Interventions

Discussions générales

PLF 2012 : Recherche et enseignement supérieur

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
M. Michel Vaxès. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le Gouvernement prétend présenter cette année un budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » en hausse. D’un point de vue formel, ce n’est pas inexact puisque, comparés à l’année précédente, les crédits augmenteraient cette année de 1,7 % en autorisations d’engagement et de 1 % en crédits de paiement en euros courants.
Mais, une fois de plus, il s’agit d’une présentation en trompe-l’œil. En effet, si nous retirons l’opération de transfert progressif du paiement des pensions, la hausse annoncée se révèle sensiblement plus modeste puisque se réduisant à 1 % en autorisations d’engagement et à presque rien en crédits de paiement : 0,008 %. Nous observons surtout que la composante « recherche » proprement dite régresse de 0,1 % en autorisations d’engagement et de 1,4 % en crédits de paiement.
Au total, ces deux dernières années, les crédits de la mission auront chuté de plus de 4 % en euros constants et se trouveront l’an prochain à un niveau inférieur à celui de 2007, toujours en euros constants.
De fait, la situation depuis 2007 n’est guère reluisante. Une fois de plus, les postures d’affichage masquent la réalité. Aucun emploi statutaire n’a été créé, le nombre de CDD et de contrats précaires a explosé : 15 000 pour la seule Agence nationale de la recherche.
Vous n’avez pas réussi à développer la recherche privée qui reste l’un des principaux handicaps de notre pays. Vous voulez transformer les laboratoires de recherche publics en prestataires de service des entreprises mais vos décisions conduisent, comme chez SANOFI, à la fermeture des centres de recherche de grandes entreprises privées trop heureuses de profiter de l’aubaine.
Un effet d’aubaine que l’on retrouve dans le crédit d’impôt recherche, cette niche fiscale au coût exorbitant – 5,8 milliards d’euros en 2009 –, et qui n’a pas atteint ses objectifs. Indépendamment même des abus manifestes dénoncés par la Cour des comptes depuis 2009, nombre d’économistes, au sein du très libéral Cercle des économistes, par exemple, s’accordent à considérer que ce dispositif n’est pas suffisamment ciblé. Nous partageons leurs réserves et lui préférerions un dispositif d’aides directes réservé aux PME, à l’instar de ce qui se pratique en Allemagne ou au Pays-Bas.
C’est pourquoi nous estimons indispensable que ce dispositif soit revu afin qu’il impulse une réelle dynamique de croissance et d’emploi, ce qu’est loin de promettre le dispositif en vigueur.
La France se trouve aujourd’hui au quatorzième rang mondial pour l’effort de recherche. L’objectif de consacrer à la recherche 3 % du PIB en 2012, promis par Nicolas Sarkozy, sera demeuré un vœu pieux. Car pour atteindre 3 % du PIB, il faudrait pendant dix ans augmenter son budget au minimum de 5 % par an hors inflation et hors croissance du PIB. C’est dire que, sans une politique volontariste, la France risque d’occuper durablement le vingt-sixième rang mondial, sur trente-deux pays classés, pour le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Quant au financement, par la voie du grand emprunt, des pôles d’excellence, à 1’evidence il ne permettra pas de sortir de l’ornière. Bien au contraire, car il a en réalité pour objectif de promouvoir un système universitaire à deux vitesses, ce qui aura pour conséquences le renforcement des inégalités territoriales, la marginalisation de la moitié des universités, la soumission de l’autre moitié à une gouvernance rigide, excluant des processus décisionnels les représentants des personnels et des étudiants.
Il ne s’agit pas de notre conception de l’enseignement supérieur et de la recherche. Nous sommes à l’opposé de vos orientations, car nous sommes favorables à des financements pérennes, adossés au budget de l’État et conformes aux missions de production et de transmission des savoirs propres à l’université.
Avec l’immense majorité des chercheurs, nous sommes de fervents défenseurs de l’autonomie de la recherche et des universités, tandis que, pour vous, l’autonomie signifie la concentration du pouvoir dans les mains de présidents d’université transformés en purs gestionnaires. Elle se traduit en vérité par une perte d’autonomie des laboratoires de recherche et aura pour corollaire, à terme, l’étroite soumission des présidents d’université aux logiques du marché.
Pour nous, la priorité est au contraire de garantir l’autonomie de la recherche et des universités vis-à-vis des marchés. C’est pourquoi nous voterons contre votre projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Imprimer cet article

Michel
Vaxès

Thématiques :

Pouvoir d’achat Affaires économiques Lois Finances Développement durable Affaires sociales Défense nationale Affaires étrangères Voir toutes les thématiques