Interventions

Explications de vote et scrutins

Simplification du vote par procuration

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe GDR.
M. Jean-Pierre Brard. Les députés communistes, républicains, citoyens et du Parti de gauche s’abstiendront (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) sur cette proposition de loi de simplification du vote par procuration.
Il convient d’abord de préciser que nous partageons le constat fait par nos collègues socialistes sur la nécessité d’améliorer encore le dispositif du vote par procuration. L’état actuel du droit paraît inutilement compliqué : pourquoi un mandataire ne peut-il recevoir qu’une seule procuration, sauf si le deuxième mandant est à l’étranger ? Cette restriction oblige bien souvent les familles à renoncer à leur droit de vote, pour cause de difficulté à trouver suffisamment de mandataires. La proposition de nos collègues d’autoriser deux procurations par mandataire va donc dans le bon sens, d’autant que cela pourrait avantageusement limiter le nombre de procédures administratives d’établissement des procurations, et donc représenter un gain de temps pour les services concernés.
Par ailleurs, si nous partageons avec nos collègues socialistes le constat d’une nécessaire amélioration du système actuel, c’est parce qu’il montre certaines limites. Aujourd’hui, en effet, les commissariats de police et les brigades de gendarmerie ont des difficultés à gérer les afflux de demandes, souvent concentrés dans les jours qui précèdent les scrutins. Les forces de l’ordre ont bien souvent d’autres priorités.
À l’évidence, la faute en incombe à l’insuffisance des moyens humains et financiers consacrés à ces tâches, pourtant fondamentales et relevant des fonctions les plus régaliennes de l’État. Y a-t-il quelque chose de plus important, dans notre État républicain, que de permettre le bon déroulement du suffrage universel, égal et secret ?
Les responsables des difficultés actuelles sont faciles à identifier : il s’agit de la RGPP, des suppressions de postes de fonctionnaires, des politiques d’appauvrissement délibéré de l’État et des services publics. Ce sont le Gouvernement et sa majorité, grands pourvoyeurs de purges libérales, qui sont les fauteurs de désordre dans les territoires de la République.
Pour remédier à ces difficultés, la proposition de loi qui nous a été présentée prévoyait le transfert de la compétence de l’établissement des procurations aux municipalités.
C’est ici qu’intervient notre désaccord. En effet, nous estimons que ce n’est pas aux municipalités de suppléer aux défaillances de l’État. Le transfert de charges qui serait occasionné par cette disposition ne serait pas compensé par un transfert des moyens humains et financiers correspondants. Les communes ont déjà fort à faire : les collectivités territoriales ne peuvent pas assumer la totalité des missions dont l’État se déleste.
D’autre part, l’établissement des procurations par les municipalités pose le problème des risques de fraude. Il ne s’agit pas de mettre en cause les élus locaux, mais l’histoire a montré que les procurations pouvaient s’avérer un levier de fraude,…
M. Charles de La Verpillière. Vous pensez aux mairies communistes, n’est-ce pas ?
M. Jean-Pierre Brard. …notamment dans certaines communes où les pratiques clientélistes sont connues et ont donné lieu à l’annulation de certains scrutins. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Guy Geoffroy. C’est un expert qui parle !
M. Jean-Pierre Brard. Si vous vous sentez visés, chers collègues, je n’y peux rien. Monsieur Geoffroy, pourquoi tant de décibels si vous n’êtes pas concerné ?
M. Guy Geoffroy. Très drôle ! C’est l’hôpital qui se moque de la charité !
M. Jean-Pierre Brard. Je vous en prie. Vous vous rappelez les « pannes d’électricité » dans certains DOM ? Ou encore les « urnes flottantes », du temps où feu Michel Debré était député d’un département de l’océan Indien ? Vous avez oublié tout cela ? Il est vrai que, depuis, les technologies ont régressé, puisque les urnes ne flottent plus, pas même à Châtillon, n’est-ce pas monsieur Schosteck ?
M. le président. Monsieur Brard, veuillez poursuivre votre explication de vote.
M. Jean-Pierre Brard. Je ne demande pas mieux, monsieur le président, mais reconnaissez que j’ai du mal. Je suis sans cesse interrompu.
Le rapporteur a opportunément rappelé que le maire est un officier de police judiciaire comme les autres, qu’il est habilité à dresser des procès-verbaux au nom de la justice de notre pays. Cependant n’y a-t-il pas quelque danger à confier aux services municipaux l’établissement des procurations, lorsqu’on sait que les maires et leurs adjoints sont forcément intéressés aux résultats du scrutin ?
En permettant aux municipalités de gérer les procurations, nous les placerions en situation d’être à la fois juge et partie. Cela ne nous semble pas souhaitable.
Aussi, s’ils partagent le constat d’une nécessaire amélioration du système des procurations, et si certaines des simplifications proposées par la présente proposition de loi leur semblent aller dans le bon sens, les députés communistes, républicains, citoyens et du Parti de gauche, dans un esprit de grande vigilance, s’abstiendront, afin de ne pas aller dans le sens que nous redoutons et que j’ai décrit, monsieur Geoffroy et monsieur Schosteck

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Jean-Pierre
Brard

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