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PLF 2018 - Sécurités (séance)

La parole est à M. Stéphane Peu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. Stéphane Peu. Monsieur le ministre d’État, vous avez officiellement lancé la semaine dernière, à La Rochelle, la police de sécurité du quotidien. Vous engagez deux mois de concertation. Toutefois, nous ignorons encore à ce stade quels seront les contours de cette réforme, quels moyens budgétaires lui seront alloués et quelle sera sa doctrine d’intervention.
Il s’agit, nous dit-on, de bâtir une police sur mesure, de déconcentrer certaines décisions et d’associer plus étroitement les maires. Vous vous défendez de vouloir remettre en chantier la police de proximité ; nous le regrettons, car nous y sommes très favorables.
Néanmoins, vous souhaitez retisser les liens entre la police et la population, et c’est à nos yeux une bonne intention. Ce dernier objectif est en effet primordial pour nous. Nous sommes de ceux qui estiment qu’aucun bilan sérieux n’a été tiré de l’expérience de la police de proximité, qui n’a, dans les faits, jamais pu être conduite à son terme ni véritablement évaluée.
L’attente dans notre pays est immense vis-à-vis de la police du quotidien et du changement en matière de doctrine de sécurité. Il est bien entendu normal que de nombreuses villes aient fait acte de candidature pour expérimenter la police du quotidien. J’en connais certaines (Sourires), je n’en citerai que deux : Saint-Denis, ma ville, et Dieppe, ville de mon collègue Sébastien Jumel. J’espère que nous serons entendus.
Concernant le budget qui est présenté, nous pouvons certes nous féliciter de la hausse des crédits après l’inquiétude suscitée l’été dernier par les déclarations un tant soit peu intempestives du ministre de l’action et des comptes publics. Cette hausse est toutefois nettement moins importante que celle intervenue ces dernières années, tant pour la police que pour la gendarmerie.
La ventilation des crédits fait par ailleurs question : les crédits de paiement de la police nationale pour la sécurité et la paix publiques baissent de 60 millions d’euros l’an prochain, tandis que ceux qui sont consacrés aux missions de police judiciaire augmentent de 180 millions d’euros.
Cette question de la ventilation des crédits, et donc de la traduction des choix budgétaires en termes de présence des policiers sur le terrain suscite beaucoup d’inquiétude. Je me fais ici le porte-parole de la population d’une ville populaire qui souhaite que, dans l’espace public, là où les incivilités et les actes de délinquance empoisonnent le plus la vie de nos concitoyens, il y ait « du bleu dans la rue », pour reprendre une expression policière, c’est-à-dire de la police de sécurité publique. Or, les crédits alloués à celle-ci sont en baisse.
Nous ne pouvons non plus faire l’impasse sur la grande disparité des moyens selon les territoires et le sentiment d’abandon partagé par un certain nombre de villes et de quartiers populaires. À cet égard, notre assemblée va conduire une mission d’évaluation de l’action de l’État dans l’exercice de ses missions régaliennes dans le département de Seine-Saint-Denis en ciblant les thèmes de la police, de la justice et de l’éducation. Parmi les questions qui se posent figure celle de l’adéquation des effectifs départementaux aux réalités du terrain. Il y a nécessité de nous pencher d’urgence sur les fortes inégalités territoriales en termes d’adaptation des crédits aux besoins identifiés et, éventuellement, de revoir certaines réformes qui n’ont pas fait leurs preuves ; je pense notamment à la police d’agglomération en région parisienne.
Avant de conclure, je dirai un mot du budget de la sécurité civile. Les dépenses d’investissement des SDIS – les services départementaux d’incendie et de secours – ont été régulièrement diminuées ces dernières années. Vous baissez encore l’an prochain de manière drastique la dotation de soutien aux investissements structurants de ces services. Cette décision est pour nous absolument incompréhensible. Les incendies de l’été dernier pointent au contraire la nécessité de soutenir l’investissement et de prolonger notamment, comme vous y invite le rapporteur, l’effort d’acquisition pour régler enfin de façon satisfaisante la question du vieillissement de la flotte de Canadair.
Pour conclure, nous prenons note avec satisfaction de votre engagement en matière de police du quotidien, sans perdre de vue les problèmes de ventilation des crédits que j’ai évoqués ni les inégalités territoriales persistantes. Dans un esprit constructif, et peu de missions ont été ainsi considérées, notre groupe proposera l’abstention.

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Stéphane
Peu

Député de Seine-Saint-Denis (2ème circonscription)

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