Interventions

Evaluation et contrôle du Gouvernement

Débat sur les conséquences de la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration pour les enfants étrangers placés à l’aide sociale à l’enfance

QUESTION AUX INVITES

Merci aux intervenants et aux députés du groupe Socialistes et apparentés qui ont lancé ce débat. Celui-ci permet au groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES de redire à quel point la loi « immigration », en particulier son volet concernant les mineurs non accompagnés, représente pour nous une abjection. En effet, ce texte mélange les politiques migratoires sécuritaires et la protection de l’enfance, voire tend à remplacer celle-ci par celles-là. Avec des collègues de l’intergroupe NUPES, nous avons déposé une proposition de loi qui permettrait d’abroger les dispositifs s’appliquant aux mineurs, mais aussi aux jeunes majeurs.
Mes questions s’adressent en priorité à Mme Noémie Ninnin.
Pour commencer, je voudrais aborder le problème de l’évaluation de la minorité. Au-delà de la loi « immigration », comment améliorer la prise en charge des mineurs non accompagnés ? On tend aujourd’hui à diversifier les modes d’évaluation plutôt que de se limiter à l’évaluation sociale. Cependant, dans 50 % à 80 % des recours, il s’avère que le jeune est bien mineur ; cela montre que quelque chose fonctionne mal. Je pense que la présomption de minorité devrait être la règle.
Par ailleurs, comment améliorer la reconnaissance des jeunes migrants en tant que victimes des réseaux de délinquance et de traite ? Après le procès des « enfants voleurs du Trocadéro », qui fait figure d’exemple, comment mieux protéger les victimes plutôt que d’en faire des coupables ?

La parole est à Mme Noémie Ninnin.

L’Unicef estime également que les mineurs non accompagnés n’auraient pas dû figurer dans le projet de loi « immigration », étant donné qu’ils relèvent du droit commun relatif à la protection de l’enfance.
S’agissant de l’évaluation de la minorité, l’Unicef recommande d’appliquer la décision du Comité des droits de l’enfant des Nations unies du 25 janvier 2023, qui avait condamné la France en matière de prise en charge des MNA et de procédures d’évaluation. Cette décision précise qu’il faut respecter la présomption de minorité et que le mineur doit être pris en charge jusqu’à la décision judiciaire définitive. Autrement dit, jusqu’à ce que le juge des enfants se prononce sur sa minorité ou sa majorité, le jeune est présumé mineur.
En France, la procédure est très différente ; comme elle ne respecte pas la décision du Comité des droits de l’enfant, nous la considérons inconventionnelle. L’Unicef recommande de judiciariser la procédure pour obtenir, dès le début du processus, une intervention du juge des enfants qui peut statuer sur la minorité ou non du jeune. L’évaluation relève des départements, mais nous recommandons au moins de prendre l’enfant en charge jusqu’à la décision judiciaire définitive, conformément au droit international.
Pour ce qui est de la traite, le fait que les jeunes non accompagnés en conflit avec la loi sont généralement des victimes reste trop rarement reconnu. Les rapports de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) comme les rapports d’information parlementaires indiquent que les jeunes sont en général victimes de réseaux ; on les drogue, on leur impose de voler pour rembourser leurs dettes. Pourtant, on ne considère pas ces enfants directement comme des victimes. Lorsque les indicateurs de traite sont reconnus, le principe de droit international qui s’applique est celui de non-sanction ; au contraire, le mineur doit être protégé. Aborder le problème par l’angle de la traite résoudrait beaucoup de problèmes dans la prise en charge. Nous recommandons donc d’utiliser des indicateurs susceptibles d’être évalués tout au long de la procédure pénale, pour protéger les mineurs victimes de traite.

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