Interventions

Evaluation et contrôle du Gouvernement

Débat sur le bilan relatif à la loi confortant le respect des principes de la République

Dans le discours qu’il a prononcé aux Mureaux, le 2 octobre 2020, Emmanuel Macron avait annoncé la présentation d’un projet de loi visant à renforcer la laïcité et à consolider les principes républicains. Il avait alors reconnu le recul des services publics, les défaillances des politiques de la ville et du logement, de la mixité sociale et de la politique éducative. Il déclarait ainsi : « Nous avons nous-mêmes construit notre propre séparatisme.

C’est celui de nos quartiers, c’est la ghettoïsation que notre République […] a laissé faire […]. Nous avons créé ainsi des quartiers où la promesse de la République n’a plus été tenue […] ».

Ce discours comportait des constats justes appelant des réponses fortes, mais il convenait de se tenir éloigné des polémiques et des stratégies d’affichage ; or celles-ci ont, hélas ! ponctué l’examen d’une réforme dont les dispositions, pour la plupart à caractère répressif, étaient inutiles et périlleuses.

Plus d’un an après la promulgation de la loi confortant le respect des principes de la République, dite loi séparatisme, les inquiétudes exprimées lors de l’examen du texte demeurent pleinement légitimes.

Alors que les députés communistes avaient déploré, dans cet hémicycle, l’absence des mesures sociales pourtant promises par le Président, qui devaient concrétiser la promesse de l’égalité des chances, vous n’avez cessé, depuis, de continuer à démolir notre République sociale, et nous en savons quelque chose – l’actualité en témoigne.

Nous nous étions également opposés à une loi que nous jugions caractéristique de l’instrumentalisation de la laïcité à des fins politiciennes. Nous n’avons eu de cesse de rappeler que la laïcité voulue par Aristide Briand et Jean Jaurès n’était en aucun cas une négation de la religion, mais bien un élément de concorde – j’y insiste – indispensable à la cohésion nationale. Or, plus d’un an après l’adoption de votre loi, force est de regretter que certaines de ses dispositions, en fragilisant les libertés publiques, ont pour effet d’affaiblir les principes républicains eux-mêmes.

Je concentrerai mon propos sur les atteintes portées à la liberté d’association par la mise en œuvre du contrat d’engagement républicain, lequel s’apparente surtout, pour les associations, à un contrat de défiance, de suspicion et de contrôle. Nous vous avions alertés, lors de l’examen du texte, sur les possibles dérives du dispositif, compte tenu de la marge d’appréciation subjective laissée à l’administration pour juger du respect de ce contrat et du pouvoir qui lui était octroyé de refuser ou de retirer rétroactivement des subventions, au mépris des droits acquis.

Or, comme le souligne la présidente du Mouvement associatif, qui réunit la moitié des associations françaises, « ce que nous dénoncions dès le début est en train de se produire dans les faits » : sous prétexte de défendre la laïcité, le contrat d’engagement républicain, au contenu imprécis, vise à fragiliser l’engagement militant.

Ainsi, la demande de retrait, par le préfet de la Vienne, des subventions attribuées à l’association Alternatiba, mouvement citoyen pour le climat et la justice sociale, au motif qu’elle organise des ateliers relatifs à la désobéissance civile, souligne les risques de remise en cause de l’activité militante. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.) Rappelons en effet que la Cour européenne des droits de l’homme a affirmé à plusieurs reprises que la désobéissance civile dans un domaine d’intérêt général constitue un des aspects les plus importants du droit de la liberté d’expression.

Autre exemple : le planning familial de Chalon-sur-Saône a fait la promotion d’un rassemblement en faveur des droits des femmes qu’il organisait au moyen d’affiches sur lesquelles figurait une femme voilée. Le maire de la ville a décidé de retirer les subventions accordées à l’association, et il a fallu que le tribunal administratif annule cette décision pour que celle-ci ne soit pas spoliée de ses droits. (Mêmes mouvements.)

Ces affaires démontrent que nous avions raison de souligner les dysfonctionnements que provoquerait le contrat d’engagement républicain.

C’est d’ailleurs en raison de ces dysfonctionnements que vingt-cinq associations, dont les principales ONG environnementales et anticorruption, ont déposé un recours devant le Conseil d’État contre le décret instituant ce fameux contrat. (Mêmes mouvements.)

Nous partageons pleinement leur constat ; nous rappelons solennellement que la vie associative est un pilier de la citoyenneté et nous exprimons de nouveau nos vives préoccupations s’agissant des atteintes portées à la liberté d’association par le contrat d’engagement républicain. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

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