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Suppression des zones à faibles émissions mobilité

La présente proposition de loi tend à supprimer purement et simplement les zones à faibles émissions, au motif qu’il s’agit de périmètres de restriction de la circulation socialement injustes et ciblant les ménages de la classe moyenne. Nous partageons l’idée que ce dispositif a été mal pensé, mal calibré, et qu’il est de ce fait actuellement inapplicable et socialement calamiteux. Néanmoins, il répond à des enjeux sanitaires et environnementaux essentiels, le trafic routier demeurant, contrairement à ce qu’affirment les auteurs de cette proposition de loi, le premier responsable de la pollution dans les agglomérations.

Le 17 octobre dernier, le Conseil d’État, constatant que les valeurs limites de pollution restaient dépassées dans neuf zones en 2019, a ordonné au Gouvernement, pour la troisième fois, de prendre des mesures pour réduire la pollution de l’air, sous astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard. Voilà pourquoi nous ne nous sommes jamais prononcés en faveur la suppression de ce dispositif ; nous avons plutôt souhaité son ajournement provisoire. Nous jugeons en effet que les ZFE-m ne pourront être mises en place que le jour où seront prises des mesures d’accompagnement social efficaces. Cela passe par une expérimentation de la gratuité des transports publics dans les agglomérations qui ne l’appliquent pas encore, par l’amélioration de l’offre de transports, qu’il s’agisse des dessertes, des fréquences et d’amplitude horaire, par le renforcement des aides à la conversion pour les classes populaires et l’élargissement des critères d’éligibilité aux véhicules thermiques récents peu émetteurs, ou encore par la prise en charge obligatoire par l’employeur du forfait mobilités durables.

La mission d’information flash, conduite par nos collègues Gérard Leseul et Bruno Millienne, a abouti à la formulation d’autres recommandations intéressantes pour améliorer le système de vignettes Crit’Air, dont les principes de classification demeurent très contestables. L’idée étant de développer les infrastructures et les réseaux de transports publics jusqu’aux communes périphériques, de même que les parkings relais sécurisés et gratuits en périphérie des ZFE-m.

Le texte qui nous est présenté ce matin ne tient aucun compte de ces propositions. Il va même jusqu’à supprimer le dispositif de prêt à taux zéro, sous conditions de ressources pour l’acquisition d’un véhicule propre – il représente pourtant une avancée, aussi timide soit-elle.

Pour notre part, nous refusons de céder à la démagogie. Si nous sommes favorables à un moratoire sur la mise en place des zones à faibles émissions et à la refonte du dispositif, nous sommes hostiles à sa suppression pure et simple. L’impact de la pollution de l’air sur la santé – elle causerait 48 000 morts prématurées par an dans notre pays, selon Santé publique France – justifie la mise en œuvre de mesures restrictives de la circulation dans les grandes agglomérations. Ces mesures doivent toutefois reposer sur un esprit de justice et d’équité, de façon à permettre à tous d’accéder aux zones à faibles émissions régulièrement ou occasionnellement.

À cette fin, des moyens budgétaires significatifs peuvent être engagés. Or ce n’est pas la voie qui est empruntée aujourd’hui : l’État se défausse de ses responsabilités, au détriment de la qualité et de l’accessibilité des services de transport urbain de voyageurs. Nous savons pourtant que le renforcement des investissements pour développer les infrastructures et les réseaux de transport public, la baisse du prix des tickets et l’augmentation de la fréquence et des amplitudes horaires sont l’une des clés de la réussite d’une politique de réduction de la place des voitures en ville, au même titre que l’augmentation du bonus écologique et la prime à la conversion en faveur des plus modestes.

Malgré les critiques nombreuses que nous inspirent, depuis l’origine, les zones à faibles émissions, nous nous inscrivons dans une logique de mieux-disant. En conséquence, les députés du groupe GDR-NUPES voteront contre la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)

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Soumya
Bourouaha

Députée de Seine-Saint-Denis (4e circonscription)

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