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Discussions générales

Simplification du droit de l’urbanisme et du logement (CMP)

Nous arrivons au terme de la discussion d’un texte qui comprenait à l’origine quatre articles et désormais plus d’une trentaine. Si nous sommes de ceux qui considèrent que la complexité des démarches de délivrance des autorisations ou de révision des documents d’urbanisme place nombre d’élus –⁠ notamment ceux des petites communes rurales – devant des difficultés bien réelles, nous restons pour le moins perplexes sur le texte de simplification issu de la navette parlementaire.
Il a été transformé en un catalogue de dérogations au droit de l’urbanisme sur lesquelles nous ne disposons pas d’étude d’impact et dont les effets pourraient être très variables d’un territoire à l’autre.
S’il est nécessaire de faire évoluer notre droit de l’urbanisme pour une mise en application plus facile de la part des élus, de telles dispositions ne sauraient se traduire par des coups de canif dans les objectifs de transition écologique et de protection de l’environnement, ou dans les procédures de participation du public.
À cet égard, la proposition de loi comporte un certain nombre de mesures très discutables parmi lesquelles : l’assouplissement des obligations de solarisation pour les parcs de stationnement, alors que ces surfaces artificialisées doivent concentrer les efforts pour atteindre nos engagements climatiques plutôt que les zones agricoles ou naturelles ; la limitation du droit de recours, et l’extension des possibilités de recours à la consultation du public par voie électronique ; l’abrogation de l’obligation pour toute action ou opération soumise à évaluation environnementale de faire l’objet « d’une étude d’optimisation de la densité des constructions dans la zone concernée, en tenant compte de la qualité urbaine ainsi que de la préservation et de la restauration de la biodiversité et de la nature en ville ».
Les travaux en CMP ont heureusement permis de voir disparaître des propositions très problématiques comme la réduction des obligations de solarisation des bâtiments ou la mesure imposant aux locataires des logements sociaux de louer une place de parking dans leur immeuble.
Il reste que ce texte porte de nouvelles atteintes au droit de l’environnement et aux droits de nos concitoyens, en les éloignant parfois des grandes décisions d’aménagement, alors que 50 % des enquêtes publiques sont des enquêtes d’urbanisme, et que les enquêtes de proximité sont celles qui enregistrent la plus forte participation du public.
Par ailleurs –⁠ et c’est le point le plus problématique –, ce texte n’apporte pas de réponse à la crise du logement que connaît notre pays. Il n’impulsera pas de réel élan pour relancer la construction, tant les réponses à la crise que nous vivons sont structurelles et ne relèvent pas directement des problèmes liés au seul droit de l’urbanisme.
Rappelons que seuls 259 000 logements ont été mis en chantier en 2024 contre 435 000 en 2017, soit quasiment moitié moins.
Ce texte n’ouvre pas non plus de perspectives pour remédier à la baisse de 19 % en dix ans de l’offre locative sociale. Je rappelle que 2,8 millions de ménages, soit environ 5 millions de personnes, attendent un logement social, sans compter les 350 000 personnes sans domicile fixe dont certaines continuent de mourir chaque année dans la rue.
Même si je salue le travail du rapporteur et certaines mesures inscrites dans ce texte –⁠ notamment la meilleure transmission des données de l’administration fiscale aux collectivités pour lutter contre la vacance –, le véhicule de la proposition de loi apparaît très insuffisant au regard de l’urgence à reconstruire une grande politique du logement.
Adapter notre droit de l’urbanisme aux enjeux d’aménagement différencié de nos territoires, aux défis posés par le changement climatique comme répondre à la crise du logement tout en permettant de développer l’emploi et la réindustrialisation dans les secteurs du bâtiment et de la construction supposent d’opérer un travail de fond et de renouer sérieusement avec ces gros mots que sont la planification et la programmation.
Nous en sommes très loin aujourd’hui, que ce soit sur le plan budgétaire, monsieur le ministre, ou au regard du désengagement continu des gouvernements qui se sont succédé ces dernières années.
Comme en première lecture, les députés du groupe GDR s’abstiendront sur ce texte, et restent dans l’attente d’une véritable loi de programmation digne de ce nom. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

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Julien
Brugerolles

Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)
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