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Renforcer la prévention et la lutte contre le risque d’incendie

Le groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES se réjouit de l’inscription du présent texte à l’ordre du jour de notre assemblée. Après l’effroyable bilan des incendies de l’an dernier, en France comme en Europe, l’adaptation de la stratégie française de prévention et de lutte contre les incendies de forêt est devenue une urgente nécessité. La durée et l’intensité des vagues de chaleur qui frappent régulièrement notre continent, tout comme la récurrence des épisodes de sécheresse, imposent de procéder à un réexamen critique de l’efficience de notre politique de sécurité civile.

Le texte qui nous est soumis présente à cet égard l’indéniable avantage de mettre le pied dans la porte, en proposant des mesures d’adaptation qui vont dans le bon sens et contribuent à débroussailler le maquis administratif actuel. Nous ne pouvons qu’accueillir favorablement la définition d’une véritable stratégie interministérielle visant à mieux coordonner, sur le plan national, la lutte contre les feux de forêt. Nous regrettons cependant, comme d’autres, que cette stratégie ne s’adosse pas à un plan plus général d’adaptation de la forêt au changement climatique, afin de permettre à la forêt française de jouer pleinement son rôle dans l’atténuation du réchauffement et de ses conséquences. Nous partageons néanmoins la volonté que traduit ce texte d’intégrer de manière plus large des instruments de planification. Nous saluons aussi le renforcement des obligations légales de débroussaillement. Enfin, nous souscrivons à la nécessaire accentuation de la sensibilisation des citoyens, des élus et des professionnels concernés.

Néanmoins, si les objectifs de ce texte sont louables, les moyens restent insuffisants. Les amendements de suppression déposés ce week-end par le Gouvernement, visant l’exonération de la taxe sur les carburants, montrent que vous n’avez pas pris la mesure des besoins. L’extension géographique des incendies met dès à présent à mal les échanges interdépartementaux en matière de lutte contre ce fléau. La Fédération nationale des sapeurs-pompiers (FNSPF) appelle en conséquence à disposer de 250 000 sapeurs-pompiers volontaires d’ici à 2027, contre 197 000 actuellement. Le chef de l’État a pris des engagements en ce sens et le présent texte instaure un dispositif de prise en charge par l’État des cotisations patronales. C’est une avancée en faveur de la reconnaissance et de la valorisation de l’engagement de ces hommes et de ces femmes. Il faut aller plus loin et valoriser cet engagement dans leur parcours professionnel et leur formation. Il importe également que cette armée de réserve de volontaires, si précieuse, ne serve pas de prétexte pour baisser le budget des Sdis.

Toujours en matière de moyens, les sapeurs-pompiers soulignent – entre autres exemples – l’insuffisance du parc de camions-citernes feux de forêt (CCF). Ils chiffrent les besoins à 10 000 camions – ils en ont 3 700 actuellement. Avec un coût unitaire moyen de 300 000 euros, un tel investissement est impossible pour les Sdis. Le chef de l’État a promis des investissements supplémentaires à hauteur de 150 millions, soit à peine 10 % de l’investissement dans les seuls CCF.

Il est donc indispensable de nous doter d’une programmation financière autrement ambitieuse. Les moyens manquent également en matière de prévention : nous le constatons avec le recul préoccupant du service public forestier. L’ONF a perdu plus du tiers de ses effectifs en vingt ans.

Par conséquent, la surface de forêt gérée par chaque agent a doublé, au détriment des missions de surveillance de départs de feux, de suivi sanitaire des peuplements et de contrôle de l’application de la réglementation. Depuis des années, les syndicats réclament avec nous, sans être entendus, le retour au niveau des effectifs de 2011, au minimum. À cela s’ajoute un élément important : la majeure partie de la forêt française est détenue par des propriétaires privés, auxquels ne sont pas imposées les mêmes obligations en matière de gestion durable et de protection de l’environnement. La situation évolue, mais il importe de doter l’ONF de moyens d’intervention plus larges, afin de lui permettre de gérer ou de cogérer une part plus importante de notre patrimoine forestier.

Autrement dit, si le présent texte met un pied dans la porte, il appartient désormais à l’exécutif d’ouvrir entièrement celle-ci, en dotant les Sdis, l’ONF, mais aussi le CNPF ou encore Météo-France, des moyens matériels et humains nécessaires à l’accomplissement de leurs missions. Sous le bénéfice de ces observations, nous abordons ce débat dans un esprit constructif, convaincus que la prévention et la lutte contre les incendies de forêt ne seront efficaces que si nous y consacrons non seulement des moyens juridiques et organisationnels adaptés, mais aussi des moyens humains et financiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES. – Mme Sophie Panonacle et M. Luc Lamirault, rapporteurs, applaudissent également.)

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Yannick
Monnet

Député de l' Allier (1ère circonscription)

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