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Reconnaissance du génocide des kurdes en Irak

Le sort des Kurdes en Irak des années 1970 aux années 1990 est si éminemment sérieux que plusieurs dizaines d’années plus tard, nous souhaitions pour notre part que l’Assemblée nationale en traite autrement qu’il nous l’est proposé aujourd’hui. La forme et le fond se mêlent dans mon propos.
Nous considérons qu’il aurait convenu de demander dans cette proposition de résolution au gouvernement français de déposer une résolution au Conseil de sécurité des Nations unies, visant à juger les personnes responsables d’actes de génocide et d’autres violations graves du droit international humanitaire dans le cadre des massacres commis au Kurdistan irakien.
Ce n’est pas tout à fait, monsieur le président Lagarde, le sens de votre proposition. L’exposé des motifs entretient malheureusement un malentendu en indiquant que ces massacres sont déjà qualifiés de génocide par deux actes juridiques qui, certes, sont légaux, mais qui ne relèvent pour aucun d’entre eux d’un tribunal international – je pense aux fameux tribunaux ad hoc créés par le Conseil de sécurité qui ont abouti à la reconnaissance du génocide des Tutsis au Rwanda et des Bosniaques en ex-Yougoslavie. C’est, selon nous, à ce seul niveau que pourrait être reconnu ou non un génocide s’agissant d’une politique étatique d’une extrême violence à l’égard des Kurdes d’Irak – une politique largement documentée, notamment pour ce qui est des massacres opérés au moyen de bombardements à l’arme chimique.
La qualification de génocide ne peut être prise à la légère, vu les drames vécus par les Kurdes d’Irak, mais aussi par d’autres peuples dont le destin mérite considération, en Syrie, en Libye, au Yémen ou au Cameroun. Il est donc nécessaire d’interroger cette qualification et de s’astreindre à une procédure incontestée et incontestable. C’est, à nos yeux, la seule manière d’aider concrètement le peuple kurde d’Irak.
Nous aurions également souhaité que la proposition de résolution demande de favoriser la création d’un système de justice de transition en Irak, avec une commission de vérité et de réconciliation, et la réparation des victimes kurdes, mais également yézidies et assyro-chaldéennes – minorités dénombrant plusieurs milliers de morts.
En conclusion, en nous fondant sur les consultations auxquelles nous avons procédé – je remercie pour cela mon collègue Jean-Paul Lecoq –, nous considérons que cette résolution, qui touche à un domaine sensible, n’est pas mûre. Notre abstention – car nous nous abstiendrons – doit être comprise comme une invitation à reconstruire une résolution d’une haute ambition, de portée internationale.

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