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PnR Commission d’enquête manquements des politiques publiques de protection de l’enfance

« La protection de l’enfance sera au cœur des cinq années qui viennent. » Tels furent les mots d’Emmanuel Macron lors du débat précédant le second tour de la dernière élection présidentielle, en avril 2022. Deux ans et demi plus tard, force est de constater que cette promesse de campagne n’a pas été tenue : la situation de l’aide sociale à l’enfance n’a cessé de se dégrader.

Les alertes sont nombreuses. Il y a, bien sûr, les drames vécus par de très jeunes mineurs. Le débat sur l’hébergement des jeunes de l’ASE avait ainsi été relancé, fin janvier 2024, après la mort de Lily, une adolescente de 15 ans retrouvée pendue dans un hôtel du Puy-de-Dôme où elle avait été placée. Avant elle, en octobre 2023, Méline, 11 ans, avait également été retrouvée morte dans sa chambre d’un foyer associatif de l’Oise.

Du 14 au 18 octobre 2024, dix-neuf personnes comparaîtront devant le tribunal de Châteauroux pour – entre autres chefs d’accusation – de graves maltraitances sur une vingtaine d’enfants hébergés, en toute illégalité, entre 2010 et 2017 dans l’Indre, la Haute-Vienne et la Creuse. En réalité, alors que l’ASE du Nord leur avait confié des dizaines d’enfants, ces « familles d’accueil » n’avaient jamais obtenu l’agrément officiel des autorités.

Ces drames et ces graves dysfonctionnements doivent cesser.

Depuis 2022, la Défenseure des droits nous alerte sur l’état dramatique de la protection de l’enfance qui n’est plus « dûment assurée », selon elle, dans de nombreux territoires. Son constat sur la gravité de la situation était déjà sans appel, lorsqu’elle déclarait en 2022 : « Les réponses institutionnelles à ces besoins ne sont pas à la hauteur des enjeux et portent atteinte aux droits fondamentaux des enfants ».

De leur côté, en mars dernier, 200 travailleurs sociaux de la protection de l’enfance clamaient leur détresse dans une tribune du Monde. Ils dénonçaient la marginalisation de leur métier, des conditions de travail toujours plus difficiles et, en conséquence, l’absentéisme, les difficultés de recrutement et un recours fréquent à l’intérim – autant de difficultés qui se répercutent sur le suivi et l’accompagnement des enfants.

Nous ne pouvons pas rester sourds : régulièrement, d’anciens enfants de l’ASE interpellent les pouvoirs publics. Dès que l’ouverture de la commission d’enquête a été annoncée, certains d’entre eux ont créé le Comité de vigilance des enfants placés, notamment destiné à veiller à la qualité des travaux menés par les députés. Les membres de ce comité attendent des parlementaires un travail irréprochable, afin de mettre à jour les manques, les besoins, ainsi que les défaillances de notre système de protection de l’enfance.

Enfin, nous ne pouvons pas ignorer les appels lancés par le Syndicat de la magistrature. En mai 2024, une enquête à laquelle ont participé 176 des 522 juges des enfants de France mettait en évidence l’existence d’au moins 3 335 placements non exécutés en France – soit autant d’enfants contraints de rester dans leur famille, malgré les dangers encourus. En outre, le syndicat indiquait qu’aux placements non exécutés s’ajoutaient les placements mal exécutés. Il évoquait ainsi le cas de mineurs « ballottés de lieu d’accueil en lieu d’accueil et/ou hébergés dans des lieux non agréés par le département, voire dans des hôtels ou au camping, ce qui est pourtant interdit par la loi ». Au-delà de ce manque de places et de structures adaptées, l’enquête montrait aussi que les juges des enfants manquaient cruellement de temps. Alors qu’ils sont censés entendre tout mineur capable de discernement, comme le prévoit la Convention internationale des droits de l’enfant, 34 % des juges des enfants déclaraient ne pas procéder systématiquement à l’audition séparée des enfants.

La promesse de mettre la protection de l’enfance au cœur du quinquennat n’a donc pas été tenue. Nous ne pouvons pas attendre encore deux ans et demi. Les enfants en danger et en souffrance, les professionnels, les magistrats, les éducateurs spécialisés, les assistantes familiales, les pédopsychiatres et les associations d’enfants placés ne peuvent plus souffrir la moindre attente.

Cette commission d’enquête nous offre l’opportunité de répondre dès maintenant à leur appel. C’est pourquoi les députés communistes et ultramarins du groupe GDR prendront leurs responsabilités et voteront en faveur de son rétablissement. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC. – Mme Sophie Mette applaudit également.)

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