Nous nous réjouissons de voter – enfin ! – ce texte. L’enjeu est important. Il constitue en effet l’une des réponses, sinon à la crise du logement, qui suppose d’agir à une tout autre échelle, du moins à la raréfaction inquiétante de l’offre de logement dans le parc locatif privé. Dans de nombreuses villes, l’essor de l’hébergement touristique par des particuliers s’est mué en un business qui pénalise lourdement non seulement les habitants, les salariés et les étudiants, mais aussi – cela a été souligné – le tissu économique local.
Le nombre des hébergements de ce type a quasiment triplé depuis 2016, pour s’établir à plus de 800 000, avec pour corollaires un renchérissement des coûts du foncier, l’éviction des résidents permanents, des troubles de voisinage au sein des copropriétés, la disparition des commerces de proximité et la dévitalisation du tissu urbain – cela fait un beau florilège de nuisances. Cette vogue très lucrative des meublés de tourisme laissait jusqu’ici les maires des communes et des agglomérations concernées assez démunis ; la présente proposition de loi vient enfin remédier à cette situation.
Après des années d’âpres combats menés par les plateformes de certaines multinationales du numérique, à l’instar de Airbnb, qui pensait se mettre à l’abri de la législation française en devenant partenaire des Jeux olympiques de Paris 2024, le lobbying cède enfin le pas devant l’intérêt général.
Le texte issu de deux chambres contient des évolutions majeures. Première avancée, la généralisation du numéro de déclaration – ou numéro d’enregistrement – des meublés de tourisme à l’ensemble des territoires affectés, notamment, par une attrition du logement. La mesure permettra aux communes concernées de mieux connaître leur parc de meublés et d’agir en conséquence. Nous regrettons néanmoins que le texte renvoie à un décret l’établissement des pièces à fournir pour enregistrer les biens loués et justifier de leur qualité de résidence principale. Le Sénat avait préconisé, plus simplement, la production du dernier avis d’imposition.
Autre avancée, l’extension aux meublés de tourisme des obligations de décence énergétique qui s’imposent à la location traditionnelle. Cette disposition permettra d’éviter que les propriétaires de logements qui ne répondent pas aux critères énergétiques de décence s’exonèrent de leurs obligations en les transformant en meublés de tourisme, au détriment des personnes qui cherchent à se loger.
La possibilité donnée aux communes d’abaisser de 120 à 90 le nombre maximal de jours de location d’une résidence principale, supprimée par le Sénat, a été rétablie. Nous nous en réjouissons, même si nous souhaitions abaisser ce seuil à 30 jours par an.
Le texte comporte deux autres avancées attendues : la faculté donnée aux communes qui le souhaitent d’instaurer un régime d’autorisation préalable des changements d’usage des locaux ; la faculté donnée aux élus locaux de définir des zones où les nouvelles constructions doivent être exclusivement réservées à la résidence principale.
Enfin, le texte s’attaque au régime fiscal des locations de meublés touristiques, outrageusement avantageux, que nous dénonçons depuis des années. Ce point a fait l’objet de discussions difficiles avec le Sénat, ce qui montre que le régime fiscal des locations constitue le nerf de la guerre. En effet, c’est lui qui incite tant de propriétaires à louer leur logement en meublé de tourisme plutôt qu’en logement classique.
Nous saluons ce texte, qui constitue une avancée importante – y compris sur le volet fiscal – dans la régulation d’un phénomène qui participe à l’ubérisation de l’économie et vampirise la politique du logement, au détriment des droits les plus élémentaires de nos concitoyens et de la vie des territoires. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et EcoS ainsi que sur les bancs des commissions.)