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Pn Remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue

Je pense que nous pouvons tous nous accorder au moins sur le constat que la France traverse une crise du logement de grande ampleur, sans doute la plus importante depuis l’après-guerre. Un million de personnes sont privées de logement personnel, plus de 4 millions sont mal logées et plus de 12 millions se trouvent dans une situation de fragilité qui contraint beaucoup d’entre elles à choisir entre se chauffer et payer leur loyer. Le nombre de ménages en attente d’un logement social, qui atteint les 2,4 millions, n’a jamais été aussi élevé ; pourtant, notre pays n’en a jamais construit aussi peu. Par ailleurs, l’accès à la propriété est devenu très difficile pour les classes moyennes, compte tenu de la remontée des taux de crédit et de la multiplication des refus de prêt.

La raréfaction de l’offre de logements dans le parc locatif privé constitue un autre facteur de cette crise. Elle s’explique en particulier par la croissance exponentielle des locations de meublés de tourisme, dont le nombre a quasiment triplé depuis 2016 et s’élève désormais à près d’un million. Elle a pour conséquences l’éviction des résidents permanents, la disparition des commerces de proximité et la dévitalisation du tissu urbain.

Si le caractère très lucratif de la location des meublés de tourisme aiguise l’appétit des investisseurs particuliers et professionnels, il plonge les maires, les habitants, les jeunes et les salariés des communes concernées dans un profond désarroi.

Il a fallu des années de combats, comme celui qu’a mené la mairie de Paris, pour obtenir une première loi et des décrets d’application afin de limiter le nombre de jours de location à 120 jours, de permettre aux maires de disposer des numéros des loueurs et de mettre à l’amende les plateformes qui ne retirent pas les annonces dépourvues d’enregistrement.

Ces mesures n’ont toutefois pas permis d’endiguer la prolifération des meublés de tourisme dans les grandes agglomérations et les communes touristiques. Le lobbying féroce d’une certaine multinationale du numérique y est pour beaucoup. Il continue en effet de trouver des oreilles attentives – peut-être le vérifierons-nous ce soir – dans les couloirs de Bercy et de l’Élysée. Ce n’est pas parce qu’on est partenaire premium du Comité international olympique qu’on a tous les droits dans le pays qui accueille les Jeux olympiques !

Et c’est encore moins une raison pour que l’État cède devant cette entreprise.

Nous nous réjouissons donc que vienne enfin en discussion, après de nombreux atermoiements, la proposition de loi défendue depuis plusieurs mois par Annaïg Le Meur et Inaki Echaniz.

Enrichi par nos travaux en commission, ce texte comporte des évolutions que nous jugeons majeures, comme la généralisation du numéro de déclaration ou d’enregistrement des meublés de tourisme à l’ensemble des territoires affectés par une attrition du logement. Cette mesure permettra aux communes concernées d’avoir une meilleure connaissance de leur parc de meublés et d’agir en conséquence.

En outre, il laisse aux élus locaux la possibilité d’étendre aux meublés de tourisme les obligations qui découlent de la décence énergétique pour la location traditionnelle. Cette mesure bienvenue permettra d’éviter que les propriétaires de logements qui ne répondent pas aux critères énergétiques de décence s’exonèrent de leurs obligations en les transformant en meublés de tourisme, au détriment des personnes qui cherchent un logement.

La possibilité offerte à toutes les communes qui le souhaitent d’instaurer un régime d’autorisation préalable des changements d’usage des locaux constitue également une avancée attendue.

Enfin, le texte s’attaque au régime fiscal des locations de meublés touristiques. Nous dénonçons depuis des années ce régime outrageusement avantageux. Lors de l’examen du projet de loi de finances, nous avions défendu un amendement visant à réduire à 40 % la déduction forfaitaire dans la limite de 30 000 euros pour les meublés classés et de 15 000 euros pour les meublés non classés. Nous nous réjouissons donc de la retrouver, même atténuée, dans cette proposition de loi : le régime fiscal des locations est en effet le nerf de la guerre. C’est lui qui décide tant de propriétaires à louer leur logement en meublé de tourisme au détriment de l’accès au logement.

Nous saluons donc cette proposition de loi – mais si son volet fiscal était supprimé, son ambition serait fortement amoindrie – comme une avancée dans la régulation d’un phénomène délétère, l’ubérisation de l’économie, et du détournement de la politique du logement au détriment des droits les plus élémentaires de nos concitoyens et de la vie de nos territoires.

Le groupe GDR-NUPES votera donc ce texte, mais sera vigilant à l’égard de ses évolutions au cours des débats.
(Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES ainsi que sur les bancs des commissions.)

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Stéphane
Peu

Député de Seine-Saint-Denis (2ème circonscription)
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