Le 16 août 2022, le gouvernement supprimait la contribution à l’audiovisuel public dans le cadre de la loi de finances rectificative. Créée en 1933, cette redevance rapportait environ 3,7 milliards d’euros par an. Principale source de financement des six organismes de l’audiovisuel public, soutenant la création, la fiction et l’information de service public, elle représentait une garantie essentielle pour l’indépendance et la qualité de l’audiovisuel public.
La suppression de cette taxe, promesse de campagne d’Emmanuel Macron, visait à « soutenir le pouvoir d’achat de 23 millions de foyers », en leur épargnant 138 euros par an en métropole et 88 euros dans les départements d’outre-mer. Cependant, cette mesure n’a pas réellement amélioré le pouvoir d’achat des ménages. Le financement a été remplacé par l’affectation d’une fraction de la TVA. Ainsi, ce sont encore les ménages, y compris les plus modestes, qui financent indirectement l’audiovisuel public à travers leur consommation. En effet, comme l’indique le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), « la TVA est un impôt régressif dans la mesure où son poids dans le revenu disponible des ménages décroît avec le revenu ». Cette réforme n’a donc pas conduit à une plus grande équité fiscale. Au contraire, elle a instauré un mode de financement injuste, exonérant ceux dont la part de revenu consacrée à la consommation est moindre de contribuer au financement du service public audiovisuel.
De surcroît, à cadre organique constant, la suppression de la redevance a exposé le service public audiovisuel au risque d’une budgétisation de son financement à compter du 1er janvier 2025. En effet, la loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques prévoit que les impositions de toutes natures ne peuvent être affectées à un tiers autre que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale, et que « leur affectation ne peut être maintenue que si ce tiers est doté de la personnalité morale et si ces impositions sont en lien avec les missions de service public qui lui sont confiées ».
Ainsi, nous en sommes à devoir réparer les erreurs de l’ancienne majorité parlementaire en votant à la hâte une proposition de loi organique qui vise à modifier cette loi organique afin de déroger à ce principe et d’éviter une budgétisation du financement de l’audiovisuel public qui mettrait à mal son indépendance économique ainsi que sa crédibilité au niveau international.
Le gouvernement nous oblige donc à céder à son chantage en votant en l’état un texte loin de satisfaire aux exigences de pérennité et de stabilité du financement dont l’audiovisuel public a tant besoin.
En premier lieu, le vote de ce texte ne dispensera pas l’audiovisuel public des économies budgétaires prévues par le projet de loi de finances pour 2025. Par ailleurs, l’application de cette réforme du cadre organique ne mettra pas fin à la conditionnalisation du financement à laquelle nous assistons depuis l’année 2023 avec la création du programme de transformation. Enfin, si cette réforme du cadre organique permettra effectivement de pérenniser l’affectation d’une fraction du produit de la TVA, ce mode de financement est loin de garantir stabilité et prévisibilité des recettes, puisqu’il pourra être revu annuellement dans le cadre de l’examen de loi de finances.
En somme, le gouvernement cherche à se décharger de sa propre responsabilité alors que nous savons parfaitement qu’il aurait pu, à cadre organique constant, réinstaurer une contribution à l’audiovisuel public réformée.
Dans un contexte médiatique marqué par la concentration des médias, la méfiance envers les journalistes, la multiplication de la désinformation et la fatigue informationnelle, il est urgent de renforcer le service public audiovisuel dans son rôle de garant de la pluralité et de la qualité de l’information, ainsi que dans son indépendance vis-à-vis du pouvoir économique et politique.
C’est pourquoi le groupe GDR est favorable à l’instauration d’une contribution à l’audiovisuel public universelle et proportionnelle. Cette nouvelle redevance serait payée par l’ensemble des personnes physiques et son montant serait proportionnel au revenu disponible, ce qui permettrait d’avoir un financement plus juste et un rendement plus dynamique.
De même, ce nouveau mode de calcul, universel, serait plus en phase avec la réalité des usages de l’audiovisuel. En effet, la télévision se regarde désormais sur tous les écrans et la possession ou non d’un téléviseur n’est plus un critère de service public.
Par esprit de responsabilité à l’égard du service public audiovisuel et de ses travailleurs, nous voterons en faveur de ce texte. Pourtant, ce texte ne clôt pas les débats sur le financement de l’audiovisuel.