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Discussions générales

Nationalisation d’ArcelorMittal France (PPL)

Il faut commencer par le dire sans détour : cela fait bientôt vingt ans qu’ArcelorMittal organise méthodiquement la disparition de la sidérurgie française. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EcoS.)

Depuis l’offre publique d’achat (OPA) agressive de 2006, les destructions d’emplois et les fermetures se succèdent : Gandrange en 2009, après quarante ans d’exploitation, les deux hauts-fourneaux de Florange en 2012, une unité à Dunkerque en 2020 et, depuis 2023, l’arrêt prétendument provisoire d’un haut-fourneau à Fos-sur-Mer. Au printemps dernier, la suppression de plus de 600 postes en France a été brutalement annoncée sur sept sites, dont la moitié à Dunkerque, alors même que le groupe, numéro 2 mondial de la sidérurgie, réalise des profits records.

En cet instant, je pense aux 600 salariés, souvent hautement qualifiés, dont l’emploi est menacé. Je pense aux conséquences sur leur pouvoir d’achat, sur leur vie de famille. Je pense aux effets sur les commerces, les services dans les villes concernées par ces fermetures de sites.
Et pendant que les sites ferment, les savoir-faire partent au Brésil, en Inde, aux États-Unis. Ce n’est pas une stratégie industrielle, c’est le scénario d’un démantèlement, un démantèlement scandaleusement financé avec de l’argent public. (Mêmes mouvements.)

Car ArcelorMittal reçoit chaque année des centaines de millions d’euros d’aides publiques. Pour la seule année 2023, le groupe a bénéficié de 298 millions d’euros d’aides publiques payées par nos impôts, sans aucune transparence ni contrepartie.

Quand l’État décide d’investir massivement dans la décarbonation –⁠ 850 millions d’euros pour le seul site de Dunkerque en 2024 –, le groupe suspend le projet quelques mois plus tard, puis le relance dans une version drastiquement amputée : un seul four électrique au lieu de deux et surtout l’abandon de l’unité de réduction directe du fer, cœur du dispositif de décarbonation.
Non content de réduire le périmètre du projet, ArcelorMittal a repoussé de deux ans la date de mise en service des équipements et n’a pas lancé les commandes nécessaires, pour arracher toujours plus de concessions aux pouvoirs publics. Mitall est un maître chanteur ; avec lui, le chantage est permanent : chantage à l’investissement, chantage à l’emploi, chantage à la décarbonation, chantage aux aides publiques, alors que les salariés voient et dénoncent le manque de maintenance des sites, les sous-effectifs permanents, le recours massif au travail intérimaire et un sous-investissement chronique aux effets délétères. Aucun partenariat industriel sérieux n’est possible dans ces conditions.

La question qui nous est posée est simple : voulons-nous encore produire de l’acier en France en 2030 ? Voulons-nous que l’avenir de ce secteur industriel stratégique dépende encore des décisions d’un groupe multinational, qui, par définition, ignore l’intérêt national ? Le mot « patriotisme » n’appartient pas à la langue des multinationales. Alors que l’acier est un matériau stratégique, essentiel à des secteurs clés comme l’automobile, l’aéronautique, l’armement et la construction, voulons-nous continuer d’assister au déclin de sa production sur le territoire ?
Après avoir permis à ArcelorMittal de vivre sous perfusion d’argent public sans contreparties, il est temps que l’État reprenne la main. La nationalisation s’impose comme la seule réponse crédible pour garantir les investissements nécessaires, pour planifier la décarbonation, pour être au service de l’intérêt général et non de la rentabilité à court terme, et faire définitivement cesser le chantage d’un groupe qui ne respecte jamais ses engagements et se moque des pouvoirs publics.
Nous voterons, sans l’ombre d’une hésitation, la proposition de loi de nos collègues de La France insoumise, d’autant que nous avions déposé un texte analogue en juin dernier. (Mêmes mouvements.)

Je ne saurais conclure cette intervention sans dire un mot du Rassemblement national, un parti qui prétend défendre la souveraineté industrielle, mais refuse la nationalisation d’ArcelorMittal. La pitoyable stratégie d’obstruction du RN ne trompe personne. Toujours plus occupé à s’attirer le soutien des grandes fortunes et l’économie de la rente plutôt que de défendre les intérêts des classes populaires et des salariés, ce parti reste fidèle à lui-même. Ce n’est pas étonnant quand on sait qu’en France, comme partout ailleurs dans le monde, l’extrême droite devient le chouchou des multinationales. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS. –⁠ Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.)

Pour notre part, nous continuerons de défendre une véritable souveraineté industrielle : la nationalisation des outils stratégiques, la maîtrise publique de l’énergie et l’association toujours plus étroite des salariés à la gestion de leurs entreprises. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.)

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