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Maîtrise d’ouvrage pour les communes rurales - PPL

Je tiens d’abord à saluer l’initiative des sénateurs Dany Wattebled et Marie-Claude Lermytte, ainsi que le travail de notre rapporteur Jean Moulliere.
Cette proposition de loi aborde une problématique qui touche principalement les petites communes : le financement des investissements. Les auteurs de la proposition partent du constat, que nous partageons, que les règles qui encadrent les investissements des collectivités territoriales ne sont pas adaptées aux petites communes. Il est important de rappeler que les collectivités territoriales représentent 64 % de l’investissement public.
La loi RCT du 16 décembre 2010, renforcée par la loi Maptam de 2014, impose aux collectivités territoriales de participer à hauteur d’au moins 20 % aux projets d’investissement qu’elles lancent en qualité de maîtres d’ouvrage. Cette obligation vise à limiter la pratique des financements croisés et à encourager une meilleure transparence et une plus grande responsabilité des élus.
Face aux problèmes que suscite cette loi, des possibilités de dérogation ont été instaurées en 2019. Depuis lors, le préfet peut supprimer cette participation minimale au cas par cas, pour certains projets. Mais ces dérogations sont insuffisantes. D’une part, elles ne peuvent pas s’appliquer aux investissements liés à la voirie et à la rénovation énergétique des bâtiments – postes de dépense très importants et souvent prioritaires pour les petites communes rurales. D’autre part, ces dérogations sont accordées au compte-gouttes : seule une centaine de dérogations sur 22 000 projets d’investissement ont été accordées par les préfectures. La sous-utilisation de ce dispositif dérogatoire s’explique par le manque d’information : de nombreux élus ignorent qu’il leur est possible d’y recourir. De plus, les dossiers administratifs de demande de dérogation sont complexes et particulièrement difficiles à traiter pour les petites communes qui ne peuvent absorber une telle charge administrative.
Rendre automatique ce régime dérogatoire pour toutes les communes disposant d’un nombre d’habitants inférieur à un certain seuil simplifiera les choses alors que, dans un contexte budgétaire de plus en plus contraint, le reste à charge constitue un réel frein à l’investissement, obligeant certaines communes à renoncer à des projets pourtant indispensables. L’abaissement du seuil de 20 % à 5 % est donc bienvenu.
Cependant, cette avancée ne sera pas suffisante pour permettre aux petites communes de mener l’ensemble de leurs projets d’investissement. En effet, d’où viendront les 15 % supplémentaires de cofinancements requis, à l’heure où trouver 80 % de financements extérieurs relève déjà de l’exploit ? Il est d’autant plus difficile de réaliser cet exploit que l’on assiste à une multiplication des appels à projets ou à manifestation d’intérêt, nouveaux modes de cofinancement substitués aux ressources pérennes pour essayer de faire passer la pilule de la contraction budgétaire et du drainage vers les métropoles !
Comment ne pas dénoncer la diminution continue des ressources de nos petites communes, qui subissent un effet de ciseaux particulièrement insidieux ? La suppression de la taxe professionnelle, de la taxe d’habitation et de la CVAE a miné leur autonomie fiscale, tandis que leurs dépenses obligatoires augmentent fortement du fait de l’inflation et, dernièrement, de l’explosion des coûts de l’énergie !
Ces pertes de capacités de financement ne sont pas compensées et rognent, budget après budget, le principe de libre administration des collectivités territoriales. Les coupes prévues pour les collectivités territoriales dans le budget de 2025, à hauteur de 2,2 milliards d’euros, ne feront qu’aggraver la situation. De nombreux départements viennent ainsi d’annoncer la suppression de toutes leurs aides directes aux communes pour 2025 ! Le fonds Vert, quant à lui, perd 1,3 milliard, tandis que la DSIL baisse de 0,3 milliard. Voilà qui devrait encore faciliter le travail de nos maires ruraux à la recherche de 95 % de cofinancements !
Bien évidemment, les députés communistes et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine soutiennent et voteront cette proposition de loi. Nous n’en resterons pas moins fermes quant à l’exigence d’un véritable changement de cap budgétaire, au service de l’égalité des territoires et de l’ensemble de nos collectivités. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – M. Emmanuel Duplessy applaudit également.)

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)
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