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Maintien provisoire du plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs

Vous nous conviez ce soir pour nous prononcer, dans la précipitation, sur un texte que nous avons examiné en commission seulement hier. Il a été présenté par la majorité en lieu et place du Gouvernement, qui n’a visiblement pas été capable d’anticiper l’arrivée à échéance, fin juin, du dispositif de plafonnement des loyers voté l’an dernier. Il est donc revenu au groupe Renaissance de déposer à la hussarde le texte qui nous occupe, sans laisser aux oppositions la possibilité de consulter qui que ce soit et sans que nous disposions non plus de la moindre étude d’impact ni d’aucune évaluation des décisions prises l’an dernier.

Vous nous proposez en somme de reconduire un dispositif que vous n’avez même pas pris soin d’évaluer alors qu’il affecte la vie quotidienne de millions de Français, notamment les plus modestes.

Dans le contexte d’inflation actuel, un plafonnement à 3,5 % de la hausse des loyers des particuliers et des petites entreprises n’a rien d’anecdotique, d’autant qu’il fonctionne en réalité comme un plancher, car c’est à ce niveau que l’ensemble des propriétaires bailleurs fixent la hausse. (M. Jean-Paul Mattei proteste.) Si vous aviez évalué le dispositif voté l’an dernier, vous vous seriez aperçu qu’il s’agit non pas d’un plafond, mais bien d’un plancher. Autrement dit, les locataires ont déjà subi une hausse de 3,5 % et vont, avec votre dispositif, en subir une nouvelle du même montant, ce qui fait que la hausse totale atteindra 7 %.

Nous ne jugeons pas cette proposition acceptable. Vous prétendez que ce plafond de 3,5 % traduit une position d’équilibre entre la nécessité de préserver les bailleurs et celle de protéger les locataires. Toutefois, comme je l’ai dit en commission hier, cette proposition de loi est le contraire de l’équilibre : vous ne pouvez pas mettre un signe « égal » entre l’impact de l’inflation sur les propriétaires bailleurs et la réalité vécue de cette même inflation par les locataires, en particulier les plus modestes. La raison est simple : les locataires ne paient pas uniquement un loyer ; ils paient une quittance de loyer, qui comprend à la fois le loyer et les charges locatives. Ce sont donc eux qui subissent l’essentiel de l’impact de l’inflation sur le prix du logement. (Mme Sophia Chikirou applaudit.) J’insiste, ce sont bien les locataires, et non pas les propriétaires bailleurs, qui ont assumé toutes les hausses intervenues ces derniers mois, à commencer par les hausses des factures d’énergie, répercutées sur leur quittance.

Après les hausses des prix de l’énergie ces derniers mois, voilà que les ménages modestes et la classe moyenne subissent de plein fouet l’inflation des produits alimentaires, évaluée entre 15 et 20 % sur un an. Dans ce contexte, leur faire subir une nouvelle hausse de loyer ne saurait représenter une position d’équilibre, et la reconduction d’un dispositif autorisant une hausse de 3,5 % des indices locatifs dans la période qui vient n’est absolument pas adaptée.

Votre politique n’est clairement pas à la hauteur de la crise du logement, de la réalité vécue par des millions de locataires du parc privé comme du parc social, qui sont le plus souvent des jeunes, des salariés modestes ou des retraités qui n’ont pas eu la possibilité d’accéder à la propriété durant leur carrière.

Ce pseudo-bouclier que vous nous proposez ne permettra pas d’enrayer la hausse des impayés ni de soulager les millions de Français pour lesquels le loyer devient une charge de plus en plus insurmontable. Aujourd’hui, la seule réponse à la hauteur consisterait à décider d’un gel des loyers pour l’année qui vient, ou, à l’extrême rigueur, d’une hausse limitée à 1 %, comme nous allons le proposer par un amendement de repli.

Et surtout, ne nous parlez pas du Conseil constitutionnel…

Non ! Si vous aviez un tout petit peu le sens de l’histoire politique dans ce pays, vous vous rappelleriez que la loi de 1982 relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs, dite loi Quilliot, et les décisions de 1986, de 1994 et de 2000 sur le gel des loyers sont toutes intervenues sous la Ve République et ont toutes été jugées constitutionnelles. (M. Inaki Echaniz, M. William Martinet et Mme Cyrielle Chatelain applaudissent.)

Assumez votre décision de ne pas recourir au gel des loyers et de faire payer aux plus modestes de ce pays une nouvelle hausse des loyers et ne vous retranchez pas derrière le Conseil constitutionnel !

Essayez, si vous le voulez, de trouver un compromis à travers les amendements que nous allons défendre, les uns les autres, pour décider d’un gel des loyers tout à fait praticable ou d’une hausse limitée à 1 %. (Mme Cyrielle Chatelain et M. Inaki Echaniz applaudissent.) À ce moment-là, vous nous trouverez à vos côtés pour établir un vrai bouclier (Mme Cyrielle Chatelain applaudit) , et non pas un faux dispositif d’équilibre entre des gens qui paient plein pot l’inflation et d’autres qui la subissent beaucoup moins, à savoir les propriétaires bailleurs.

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