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Impôt sur le patrimoine des ultrariches, le texte est adopté !

Je tiens tout d’abord à saluer l’initiative d’Eva Sas, de Clémentine Autain et du groupe Écologiste et social (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS), qui nous permet de débattre de cet impôt plancher, calculé sur le patrimoine des quelque 1 800 foyers les plus riches de notre pays, détenteurs de fortunes de plus de 100 millions d’euros.
Comme notre rapporteure l’a indiqué, c’est une question de justice et d’égalité. Le patrimoine des centimillionnaires a explosé ces dernières décennies, captant de plus en plus de richesses qui manquent pour répondre aux besoins sociaux et humains en matière d’activité, de services publics et de transition écologique. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

Les centimillionnaires participent deux fois moins, en proportion de leurs revenus, que tous les autres contribuables, remettant en cause le consentement à l’impôt et donc notre pacte fiscal, pilier du pacte social. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Stéphane Peu applaudit également.)

Cette incongruité s’explique facilement : les ultrariches versent leurs dividendes à des holdings qui ne sont pas transparentes. L’impôt sur le revenu et le prélèvement forfaitaire unique échouent donc à taxer ces transferts de revenus. La raquette fiscale est trouée et la mesure proposée ce jour, discutée au G20, soutenue par des économistes de renom et même préconisée par certains très riches, comme en témoigne l’appel publié dans le journal Les Échos du 9 janvier dernier, est de salubrité fiscale et sociale. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Personne ne devient centimillionnaire et a fortiori milliardaire par son travail : ça n’existe pas ! (Mêmes mouvements.) On le devient grâce au travail des autres, grâce à des mécanismes de rente et d’héritage qui permettent une accumulation confinant à la spoliation. J’ajoute qu’à ces niveaux de patrimoine, le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel se confondent : restreindre l’assiette reviendrait à vider de toute sa portée ce filet de sécurité du consentement à l’impôt – car c’est bien de cela qu’il s’agit.

Les amendements présentés tant par les macronistes que par la droite et l’extrême droite pour affaiblir la portée de cette mesure démontrent, si besoin était, que le bloc de celles et ceux qui font allégeance aux grandes fortunes au détriment du peuple, ne se fissure pas. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Madame la ministre, vous honoreriez la France en appuyant ce combat juste, mais vos annonces du jour concernant la taxation du patrimoine ressemblent fort à des tentatives de diversion : elles excluent les biens professionnels et rapporteraient dix à vingt fois moins que l’impôt plancher ici proposé. (Mêmes mouvements.) Pourtant, la proposition de loi présentée par Mme Sas est si raisonnable, prévoyant un seuil d’assujettissement à 100 millions pour un impôt construit comme une contribution différentielle, qu’il faudrait être de mauvaise foi pour faire croire que le garagiste de Vierzon ou le chef d’une PME de 100 salariés, voire un notaire de province, seraient concernés ! La classe moyenne, même en retenant une définition très élargie, est exclue de cette contribution. (« Évidemment ! » sur les bancs du groupe EcoS.)
Évidemment, on nous ressort l’argument de l’exil fiscal qui séduirait nos grandes fortunes. Mais des outils existent pour l’éviter ! Les États-Unis taxent tout citoyen américain, où qu’il se trouve sur la planète, et l’exit tax peut être renforcée. Cessons les cris d’orfraie, quand on voit par exemple que le groupe le plus riche de France possède d’ores et déjà plus de 200 filiales offshore dans des paradis fiscaux (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS) : il n’a pas attendu l’adoption de cette mesure de justice fiscale !
Face à cette mesure juste et modérée, tout se passe comme d’habitude : le camp libéral jette l’anathème sur le camp social à chaque remise en question de la concurrence fiscale, érigée en loi d’airain. Partout dans le monde, cette concurrence fiscale renforce une oligarchie financière qui cumule le pouvoir économique, le pouvoir technologique, le pouvoir médiatique et le pouvoir politique. (Mêmes mouvements.) Là est le danger : cette prise de pouvoir à visage découvert par les ultrariches, fervents partisans d’un capitalisme radicalisé, qui mène à l’impérialisme, à la guerre et aux régimes autoritaires. L’histoire est truffée de ces choix des plus fortunés d’offrir le pouvoir aux fascistes pour sauver et développer leur pouvoir financier et économique, ces « irresponsables » dont parle si bien Johann Chapoutot dans son dernier ouvrage. (Mêmes mouvements.)

Mes chers collègues du bloc central, le vote que vous allez commettre en dira plus long que n’importe lequel de vos discours. En votant cette proposition de loi, nous allons bien au-delà de la justice fiscale ; nous ne nous contentons pas de mobiliser 15 à 20 milliards d’euros pour les services publics, ce qui est nécessaire, et de répondre à l’urgence climatique : nous faisons œuvre utile pour que l’oligarchie financière cesse de pourrir nos démocraties et de nous entraîner, bras tendu, vers les rives les plus sombres ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) C’est cela qui est à l’ordre du jour ; pour ces raisons, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine soutient pleinement cette initiative et votera le texte sans aucune réserve. (Les députés des groupes LFI-NFP et EcoS se lèvent et applaudissent. – M. Stéphane Peu et quelques députés du groupe SOC applaudissent également.)

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Nicolas
Sansu

Député de Cher (2ème circonscription)
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