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Droit au respect de la dignité en détention - CMP

Le groupe GDR votera également le texte. Les conditions de détention indignes dans les prisons françaises sont dénoncées depuis de nombreuses années ; les condamnations internationales et nationales se succèdent implacablement, mettant en exergue les conditions de détention inhumaines et les problèmes liés à la surpopulation structurelle des prisons françaises.

Dans le prolongement de dix-sept condamnations prononcées par la Cour européenne des droits de l’homme et d’arrêts rendus par la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel a consacré l’interdiction de soumettre les personnes détenues à des conditions d’incarcération contraires à la dignité humaine et a laissé six mois au législateur pour modifier la loi.

Jusqu’à présent, aucun recours préventif et effectif ne permettait aux personnes détenues de faire cesser pleinement et immédiatement les conditions de détention indignes auxquelles elles étaient soumises et qui portaient atteinte à leurs droits fondamentaux. Or les droits fondamentaux n’ont de réalité que si leur effectivité est assurée – un droit n’est véritablement garanti et respecté que si l’ensemble des conditions nécessaires à son exercice sont également garanties.

Ainsi, le Conseil constitutionnel nous avait donné jusqu’au 1er mars pour introduire dans notre législation un recours effectif permettant aux détenus de faire constater les conditions indignes de leur détention afin qu’il y soit mis fin.

Nous ne pouvons qu’être favorables à l’introduction d’une nouvelle voie de recours dans notre droit, qui permet à toute personne détenue se plaignant de conditions de détention indignes de saisir le juge judiciaire pour qu’il y soit mis fin, y compris en ordonnant sa mise en liberté. Elle s’impose afin de mettre la législation française en conformité avec les exigences européennes et constitutionnelles.

Soulignons cependant, comme l’ont fait la Contrôleure générale des lieux de privations de liberté et l’Observatoire international des prisons que le dispositif prévu « ne peut être regardé comme suffisant pour préserver les droits des personnes détenues ». En particulier, la solution consistant à laisser à l’administration pénitentiaire la possibilité de transférer les détenus pour mettre fin aux conditions indignes de détentions risque, selon la Contrôleure générale, de dissuader les recours de détenus qui préféreront rester incarcérés près de leur famille afin qu’elles viennent leur rendre visite au parloir.

Placer l’administration pénitentiaire dans une position où elle est, dans un premier temps, juge et partie, le juge n’intervenant qu’ensuite, ne permet pas d’assurer l’effectivité du recours. Le rapporteur au Sénat a d’ailleurs reconnu que l’un des objectifs de la proposition de loi est « d’éviter que les [juges] soient submergés par des demandes ». En outre, ce recours judiciaire pourrait se révéler inapplicable et donc ineffectif dans l’état actuel des conditions de détention et de surpopulation des établissements pénitentiaires : il n’aura de sens que si l’administration est en mesure d’offrir des solutions acceptables, à savoir des conditions d’incarcération respectueuses de la dignité, ce qui n’est pas le cas actuellement.
En définitive, outre la question de l’effectivité du dispositif proposé, nous souhaitons insister sur le fait que la création d’une voie de recours ne saurait redresser la situation que connaissent les établissements pénitentiaires français depuis de très nombreuses années. Pour autant, cette voie de recours attendue depuis longtemps recueillera les votes du groupe GDR. (M. Ugo Bernalicis applaudit.)

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