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Création de la fonction de directeur d’école

Nous examinons aujourd’hui une proposition de loi tendant à créer la fonction de directeur d’école. Vous me permettrez d’observer d’abord que si nous ne sommes pas toujours d’accord sur l’écriture inclusive, le titre de cette proposition de loi sonne bizarrement aux oreilles de chacun et chacune d’entre nous quand aujourd’hui moins de la moitié de ceux qui font fonction de directeur sont des hommes. Je rends hommage à ce propos aux nombreuses directrices qu’il m’est arrivé de croiser et qui ne sentent pas tout à fait représentées par ce titre ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et EDS, ainsi que sur quelques bancs du groupe LaREM.)

Cette proposition de loi intervient après la consultation lancée par le ministère à la suite du suicide de Christine Renon à Pantin. Depuis de trop nombreuses années, les directeurs et les directrices d’école dénoncent la dégradation des conditions de travail, ce qui a conduit peu à peu à une perte du sens de leur métier. La charge de travail s’accroît depuis les années 2000 : les tâches existantes s’alourdissent et de nouvelles apparaissent. Mme Renon disait combien les injonctions adressées aux directrices et directeurs étaient souvent contradictoires. Pourtant leur indemnité n’a pas été bonifiée depuis de nombreuses années.

Nous mesurons donc l’importance d’améliorer significativement les conditions de travail des directeurs et directrices d’école. De plus, dès l’annonce du confinement et de la fermeture des écoles, les directeurs et directrices n’ont cessé d’être au front pour assurer la continuité pédagogique et le lien entre les parents et les enseignants, puis la reprise de l’école – que certains n’avaient jamais quittée, ne serait-ce que pour accueillir les enfants de soignants – dans des conditions sanitaires parfois intenables. Là aussi, il y a eu beaucoup d’injonctions contradictoires.

Si nous nous félicitons donc de pouvoir débattre de ce sujet dans cet hémicycle, nous jugeons aussi que ce texte comporte de grandes lacunes, notamment sur la question des décharges, des indemnités, sur le sens à donner à cette fonction ainsi que sur le fait que le plus grand flou subsiste : vous avez certes tenu compte du fait que les directeurs et directrices ne souhaitaient pas être placés dans une position hiérarchique par rapport aux enseignants, mais le texte la réintroduit par petites touches.

Pour ce qui est du texte lui-même, la rédaction imprécise de l’article 1er ne permet pas de préserver le fonctionnement démocratique des écoles en France – ou, du moins, elle le permet mal –, alors que nous voyons parfois avec surprise combien la démocratie est présente dans cet espace, quand elle peut être si malmenée dans le reste de la société. Nous ne souhaitons donc pas la fragiliser davantage encore avec un texte qui ne mentionne pas assez le rôle du conseil des maîtres, pourtant si central dans les écoles. En effet, la particularité française de la direction d’école trouve sa source dans le fonctionnement démocratique de ce conseil, créé en 1908 afin de permettre un partage du pouvoir sur les questions pédagogiques et d’assurer la liberté pédagogique. Toutes les tentatives gouvernementales visant à abîmer ce modèle ont d’ailleurs suscité une levée de boucliers dans la profession, ainsi que chez les parents. L’école française ne reconnaît pas de petits chefs ; l’autorité et la crédibilité du directeur ou de la directrice viennent de son statut de pair parmi les pairs. Je rappelle à ce propos que la dernière consultation s’est conclue sur un refus des professeurs des écoles de voir donner au directeur d’école un statut de supérieur hiérarchique, certains des professeurs concernés assurant du reste eux-mêmes cette fonction.

Par ailleurs… – ce n’est pas pour vous faire taire, mes chers collègues du groupe LR, mais je suis désolée de devoir vous dire qu’il est difficile de parler dans ce bruit.

L’article 2 instaure une chaîne hiérarchique allant du DASEN, le directeur académique des services de l’éducation nationale, au cœur de l’école, en proposant la création d’emplois fonctionnels. Il est bon que nous ayons pu apporter en commission des amendements corrigeant le caractère instable de ce dispositif, mais nous ne sommes pas encore au bout du chemin : en plaçant à la tête des écoles une sorte de manager choisi par la hiérarchie, on égratignera à coup sûr le fonctionnement collégial.

Pour toutes ces raisons et pour de nombreuses autres que j’évoquerai plus tard, en l’état actuel, le groupe GDR s’abstiendra sur ce texte.

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Elsa
Faucillon

Députée des Hauts-de-Seine (1ère circonscription)
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