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Création de l’Organisation internationale pour les aides à la navigation maritime

Je me permets d’enlever ma casquette de rapporteur pour mettre celle de député du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Comme on le sait, notre groupe est composé de députés communistes mais également de députés ultramarins. Il est ainsi fondamental pour nous de toujours rappeler combien les outre-mer sont importants car ils garantissent la puissance maritime de la France ; toutes ces îles et la Guyane forment des espaces maritimes exceptionnels qui portent notre pays au deuxième rang parmi les plus grands territoires maritimes du monde. Il faut donc avoir bien conscience de la légitimité de notre pays pour accueillir la future organisation internationale. J’ai bien compris que son siège sera à Saint-Germain-en-Laye où se trouve aujourd’hui l’AISM, mais j’ai aussi entendu des collègues suggérer de le déménager. Si jamais cela devait être le cas, je pense qu’il devra rester sur l’axe Seine, quitte à aller tout au bout… Je me ferai alors une fierté d’accueillir ce siège au Havre. Mais, je l’ai dit en commission, autant je suis pour que le ministère de la mer déménage au Havre – et il y sera bien accueilli –, autant, je l’ai dit en commission, je pense qu’une organisation internationale se doit d’être à la croisée des routes internationales, et que la région parisienne, notamment en raison de ses aéroports, permet de faciliter l’accueil des délégations.

Nous sommes réunis aujourd’hui pour traiter de l’avenir de l’Association internationale de signalisation maritime sur un plan institutionnel mais également technologique et, disons-le, politique. Et c’est à ce titre que notre groupe a voulu reprendre la parole ce matin en refusant l’application de la procédure d’examen simplifiée sur ce projet de loi de ratification. En effet, la nouvelle révolution du fret maritime introduit l’enjeu d’une nouvelle aide à la navigation, une aide d’autant plus importante que les navires tendent à devenir totalement autonomes. C’est un choix de société auquel le Parlement doit être associé pour pouvoir y réfléchir. Il faut se poser la question de l’impact de ces nouvelles technologies – avions autonomes, drones mais aussi peut-être demain voitures et navires autonomes – sur la société de demain. Une réflexion globale sur les limites des utilisations de l’intelligence artificielle doit être menée par nous, élus, avec la population, et aussi par les ingénieurs et par les membres des organisations concernées comme cette future organisation internationale. Les députés communistes ne sont pas contre le progrès ; ils veulent seulement que celui-ci soit utilisé pour aider et accompagner l’humain et non pour le remplacer. Si toutes ces nouvelles technologies servent à alléger les tâches les plus éprouvantes pour les humains, c’est un pas en avant, mais si elles ne font que maximiser le profit des compagnies maritimes, cela n’aura aucun intérêt pour l’humanité.

En outre, on ne doit pas oublier que les technologies préparées en vue de cette nouvelle révolution restent extrêmement fragiles, comme j’ai pu le constater à l’occasion de la mission d’information que j’ai menée sur la diplomatie spatiale avec mon collègue Pierre Cabaré. Les satellites qui guident la navigation en permettant la mise en place de balisages virtuels sont sujets à des aléas importants, parmi lesquels figurent, au premier rang, les débris spatiaux mais aussi les tempêtes solaires que nous anticipons encore très mal et qui, demain, pourraient s’avérer très dangereuses. Nous avons recommandé dans notre rapport d’étendre la culture du risque aux hautes technologies et aux technologies numériques. La sécurité civile prévoit ainsi, en cas de coupure générale des communications, de faire appel à un réseau de radios amateurs pour communiquer malgré tout à travers le monde. Cet exemple permet de comprendre l’importance de la redondance des technologies et de la résilience de nos systèmes d’information. Lors d’une audition éclairante, M. Vincent Denamur, sous-directeur des services maritimes et du contrôle au ministère de la mer, a indiqué qu’une accidentologie propre aux nouveaux systèmes de navigation numérique était apparue du fait que certains capitaines faisaient une confiance parfois aveugle à leur outil électronique. Voilà un chantier majeur que l’AISM nouvelle version et l’OMI devront prendre en charge.

S’agissant des personnels de la future organisation, comme je l’ai dit en commission hier matin, ma première réaction en tant que député communiste a été de me renseigner sur les conditions de travail et de savoir si elles seront maintenues. Je sais qu’un accord de siège est en cours de discussion. J’ignore s’il sera soumis à notre assemblée, mais nous resterons en tout cas très attentifs à leurs conditions de travail.

Nous assistons ce matin à la naissance d’une organisation internationale, ou plutôt à la naissance d’une organisation déjà majeure, puisqu’elle a déjà montré toutes ses qualités, tout son savoir-faire, et qu’elle dispose dès à présent d’une académie dans laquelle se rendent beaucoup de délégations étrangères pour leur formation, ce qui permet un excellent partage des bonnes pratiques.

Pour conclure, monsieur le ministre, je me permets de vous remercier pour le travail fourni par la diplomatie française et de vous demander de transmettre mes remerciements à Mme la ministre de la mer qui m’a aidé à bien entrer dans ce dossier. Elle a été très attentive à la mise en œuvre de cette convention. Et je dois vous associer aux propos de mon collègue Didier Quentin car si le phare de Cordouan a été inscrit au Patrimoine mondial de l’humanité, je crois qu’un ministre de la culture que vous connaissez bien y est pour quelque chose puisqu’il avait préparé le dossier : ce ministre, c’était vous. (M. Didier Quentin et M. Alain David applaudissent.)

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Jean-Paul
Lecoq

Député de Seine-Maritime (8ème circonscription)

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