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Accord France et la Banque des règlements internationaux

Nous l’avons annoncé en commission, le groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES votera en faveur du projet de loi. Ces accords de siège, comme on les appelle dans notre jargon, sont génériques.

Peu importe l’institution à laquelle ils s’appliquent, ils permettent à des salariés d’être protégés et de voir leurs droits et leurs devoirs clairement définis. Les députés de notre groupe veulent profiter de ce texte pour aller plus loin, comme nous y a invités M. le rapporteur à juste titre, et évoquer le rôle de la Banque des règlements internationaux.

Cela a été dit, la BRI a pour mission de favoriser la coopération financière et de jouer le rôle de « banque des banques centrales » – elle surveille la stabilité financière des banques centrales. Son siège est situé à Bâle et héberge le comité de Bâle, qui élabore les lignes directrices des réglementations bancaires appelées « accords de Bâle ». Pour résumer, ces accords visent à stabiliser le système bancaire en veillant à ce que les banques respectent un certain ratio de fonds propres, ce qui leur évite de s’écrouler en cas de crise financière. Le dernier accord de Bâle, le troisième, a créé d’autres types de ratios afin d’améliorer encore la stabilité du secteur. Ces accords sont souvent retranscrits dans le droit national. S’ils restent évidemment très insuffisants, notons qu’ils ont le mérite d’exister.

Mais tout le monde ne partage évidemment pas cette idée au sein de notre hémicycle ! La majorité présidentielle – comme on l’appelait jadis ! – et le groupe Les Républicains ont adopté, en janvier 2020, une résolution visant à demander au Gouvernement de ne surtout pas retranscrire tels quels les accords de Bâle III dans notre droit, arguant d’une catastrophe à venir pour la compétitivité du secteur bancaire français – vous n’en avez dit mot, madame la secrétaire d’État. À une époque où la capitalisation mondiale atteint près de 70 000 milliards de dollars, soit 150 fois plus que les échanges réels, nous avions été choqués par cette résolution indécente, présentée par Éric Woerth et adoptée.

Malgré le rôle majeur joué par la BRI dans la stabilité financière internationale, rien, selon le dogme libéral, ne devant jamais être imposé, mais simplement recommandé, le rôle de cette institution reste assez faible.

Mais nous lui reconnaissons le mérite d’avoir dit, dès 2013 : « Les banques centrales ne sont pas des banques commerciales. Elles ne recherchent pas le profit et ne sont pas soumises aux mêmes contraintes financières que les établissements privés. En pratique, cela signifie que la plupart des banques centrales pourraient perdre de l’argent au point d’avoir des fonds propres négatifs tout en continuant à fonctionner parfaitement normalement. » Cela va dans le sens de ce que nous demandons à propos de la dette émise par la Banque centrale européenne. Pour financer les défis colossaux à venir, laissons rouler la dette et utilisons cet argent – plutôt que de le rembourser – pour mener des politiques ambitieuses. Mieux, exigeons un contrôle démocratique de la gestion de la masse monétaire, afin d’organiser au mieux la satisfaction des besoins humains et la transition écologique.

Le Fonds monétaire international (FMI) est bien placé pour agir en ce sens. Il se trouve encore au-dessus, en quelque sorte, de la Banque des règlements internationaux. C’est lui qui émet l’unité de compte de toutes les institutions internationales, dont la BRI, à savoir les droits de tirage spéciaux, que l’on appelle plus couramment DTS. Les DTS sont une sorte de monnaie, plus précisément des avoirs de réserve internationaux ; ils sont répartis en fonction de la participation de chaque pays au FMI, ce qui avantage massivement les grandes puissances économiques.

L’économiste Justin Koné Katinan milite depuis longtemps pour une réforme de ces DTS, afin de les orienter vers l’économie des pays les plus pauvres. En suivant ses réflexions, mes collègues sénateurs communistes ont déposé en décembre dernier une proposition de résolution à ce sujet. Ils demandent au Gouvernement d’œuvrer à la réforme du mode de calcul des droits de tirage pour chaque État, et à une affectation plus équitable des DTS non utilisés par les pays riches. Une telle réforme pourrait combattre efficacement la pauvreté et les inégalités, en vue de réussir le défi écologique et social auquel nous allons faire face. Je crois sincèrement que nous devrions agir pour faire en sorte que l’exécutif se mette à réfléchir de cette manière. Loin des postures, saisissez-vous de ces enjeux, et agissez réellement pour le développement des États les plus fragiles !

Se pencher sur la mission de la Banque des règlements internationaux nous permet de prendre la mesure de l’urgence qu’il y a à réformer en profondeur les institutions financières internationales, à renforcer les accords de Bâle et à améliorer la répartition des DTS. J’espère que ce message sera entendu, madame la secrétaire d’État, mais peut-être ne répondrez-vous pas – pour la troisième fois ! – à mes suggestions ou à mes questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

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Jean-Paul
Lecoq

Député de Seine-Maritime (8ème circonscription)

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