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Pouvoirs publics : renforcer les exigences de transparence financière de la vie politique

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’actualité de ces dernières semaines a souligné une nouvelle fois, si besoin était, la nécessité de renforcer les exigences de transparence financière de la vie politique, comme nous le proposent nos collègues socialistes avec le texte que nous examinons ce matin.
Depuis 1988 pourtant, la France s’est dotée d’une législation sur le financement des campagnes électorales et des partis politiques. Les différentes lois adoptées depuis ont largement modifié les usages et habitudes des partis et ont contribué à rendre plus transparent leur financement en plafonnant le montant des dépenses électorales et les dons versés aux partis. Elles ont eu le mérite de tarir l’une des sources de la corruption ; pour autant, cette législation n’est pas exempte de faiblesses. En effet, certains partis ont trouvé le moyen de contourner les règles du plafonnement fixé à 7 500 euros en créant des micro-partis permettant à une même personne physique de financer des partis satellites et de bénéficier des avantages fiscaux correspondants.
Il est temps que cette question soit examinée, d’autant que, depuis maintenant plusieurs années, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques pointent cette défaillance de notre législation. Dans son douzième rapport d’activité de 2009, elle est encore revenue sur ce point : « Rien n’interdit à un même donateur de verser le montant plafonné des dons à une pluralité de partis satellites qui reverseront les sommes ainsi recueillies au parti central, percevant ainsi indirectement de la même personne un montant nettement supérieur à celui du plafond autorisé des dons ». De même, elle rappelle la nécessité « qu’un plafond unique soit instauré cumulant le montant des dons et cotisations ».
C’est l’objet des deux premiers articles de cette proposition de loi qui va dans le bon sens et mériterait d’être adoptée par notre assemblée dans la diversité de ses opinions. Pour ce qui nous concerne, nous sommes pleinement favorables à la mise en place de tels garde-fous, d’autant que la rédaction de l’article 2 évite un élargissement contre-productif. En effet, comme vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, il ne faudrait pas que les cotisations d’élus puissent entrer dans le champ du plafonnement, ce que préconisait à demi-mot la Commission nationale des comptes de campagne. Lutter pour une plus grande transparence du financement et empêcher le contournement de la règle du plafond de 7 500 euros ne doit pas aboutir à pénaliser les partis dont les cotisations d’élus représentent une part essentielle de leurs ressources financières. Les formations politiques, qui vivent en partie grâce aux indemnités de leurs élus, doivent être encouragées et non sanctionnées, tout comme les élus qui choisissent de soutenir financièrement leur parti pour mener la bataille politique en laquelle ils croient.
En revanche, comme le rapporteur, nous nous interrogeons sur l’opportunité de l’article 3 dans sa rédaction actuelle, partageant en cela l’analyse du professeur Carcassonne, qui considère qu’une telle disposition comporterait des « dangers tangibles », soit qu’elle dissuade certains donateurs, soit que, à l’inverse, elle joue un rôle d’entraînement pour persuader certaines personnes.
Sous réserve de cette dernière observation, nous jugeons que cette proposition de loi est de nature à corriger les dysfonctionnements observés, dans la mesure où elle vise les pratiques qui permettent les détournements en facilitant les choses aux plus aisés pour financer leur parti, sans chercher à pénaliser les milliers de souscripteurs qui, par un geste souvent modeste, participent au développement des partis, vecteur de la mise en œuvre de l’intervention citoyenne dans notre pays.
Enfin, dans le cadre d’un débat plus global qu’appelle le Gouvernement, nous pensons qu’il serait souhaitable de repenser l’aide publique attribuée chaque année aux partis politiques et qui, en l’état actuel des choses, favorise surtout le bipartisme au détriment du pluralisme, pourtant garant de la démocratie : les deux principaux partis de notre pays se partagent aujourd’hui 75 % de la somme globale. Il en va de même pour le financement des campagnes électorales dans la mesure où le seuil de 5 % est parfois difficile à atteindre pour les petites formations politiques.
Sous réserve de ces remarques, les députés communistes, républicains et du Parti de gauche voteront la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
 

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Marc
Dolez

Député du Nord (17ème circonscription)
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