Interventions

Evaluation et contrôle du Gouvernement

Débat sur le thème « Le bilan des réformes de l’assurance chômage depuis 2017 »

QUESTION INVITE

Ma question s’adresse principalement à M. Valentie. Le chômage est-il dû à la qualité de la protection sociale ? À l’inverse, la dégradation de notre protection peut-elle être la source heureuse d’une baisse du chômage ? Voilà les questions que je me pose. J’en ajoute quelques autres : est-il bon de procéder à une réforme tous les deux ans – en l’occurrence à une diminution des droits tous les deux ans ? Peut-on parler de bonne gestion paritaire ?
J’aimerais aussi avoir votre sentiment sur le profil de ceux – et surtout de celles, mais vous me le confirmerez – qui ont été victimes des dernières réformes : qui sont les perdants et combien sont-ils ?

Mme la présidente

La parole est à M. Christophe Valentie.

M. Christophe Valentie

Directeur général de l’Unédic

Je commencerai par répondre à votre question portant sur le profil des personnes concernées. Rappelons que la réforme comprend trois éléments : la condition d’ouverture de droits, qui est passée de quatre à six mois, et la réforme du SJR touchent surtout les contrats courts ; la réforme de la contracyclité affecte plutôt les contrats longs, les CDI.

Nous disposons de quelques chiffres, qui sont publics. La réforme du SJR et la nouvelle condition d’ouverture de droits ont causé une baisse d’environ 30 000 ouvertures de droits par mois, soit une diminution de 14 % du nombre de personnes qui demandent à être indemnisées. L’indemnisation moyenne a baissé de 16 %, ce qui a amené 45 % des personnes indemnisées à percevoir une allocation inférieure à l’allocation journalière (AJ) dite minimale, contre 27 % avant la réforme. Ce sont surtout les petites allocations qui sont touchées par la réforme du SJR.

La durée des droits a été augmentée, puis baissée de 3,4 mois en vertu du système de la contracyclicité. Les personnes concernées sont les intérimaires, les personnes en CDD, les jeunes et les personnes peu qualifiées car ce sont eux – surtout les jeunes – qui enchaînent les contrats courts.

À l’inverse, la dégressivité a majoritairement touché les cadres, des hommes de plus de 45 ans, qui touchaient des salaires supérieurs à 7 000 euros – 90 000 personnes sont concernées.

La montée en charge de la réforme de 2021 est en cours. Aujourd’hui, environ deux tiers des gens sont concernés par la réforme de 2021, un peu moins d’un tiers par l’ancienne réforme, et 10 % par la réforme de 2023. Au milieu de l’année, 80 % des gens seront concernés par l’ensemble des réformes. Comme ce n’est pas encore le cas, nous ne disposons que d’éléments partiels sur les effets des différentes réformes.

Ce n’est pas à moi de juger s’il est bon de procéder à une réforme tous les deux ans. Je comprends cependant les propos de mon voisin sur les difficultés éprouvées par les demandeurs d’emploi – et j’y ajouterais les conseillers de France Travail – pour suivre des évolutions réglementaires qui se chevauchent et se contredisent parfois.

Je défends le modèle du paritarisme et de l’intégration des compétences pour aboutir à des règles cohérentes. On me disait toujours que les règles élaborées par les partenaires sociaux étaient compliquées ; maintenant, les agents de France Travail me disent que c’est encore pire. Du temps du paritarisme, une convention d’assurance chômage durait trois ou quatre ans, il y avait donc moins de changements. Dans les six dernières années, on a vécu la crise sanitaire et deux, voire trois réformes, ce qui perturbe quelque peu le système.

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